Un « Seeker » est « celui qui acquière le savoir dans les chemins de l’univers après avoir accepté qu’il n’en connaissait rien » mais Seekers est aussi un collectif de DJs et label basé à Berlin.

Depuis leur première soirée à l’Underground Club à Ibiza en octobre 2014, ils jouent régulièrement à l’Hopetosse (péniche du Club Der Visionaere) à Berlin et au TAG Club à Mestre, non loin de Venise. Leurs line up réunissent des ténors comme Zip, Daniel Bell, Onür Ozer, Alex Picone ou Nicolas Lutz aux cotés d’artistes prometteurs comme Niff, Andrew James Gustav, Gäbro, Etienne (Undersound), Riccardo (Imprints) ou Davy (Down Under), sans oublier les tueurs à gages Fumiya Tanaka et Francesco Del Garda qui n’ont laissé personne indifférent lors de leurs passages à Nantes. Coté label, nous ne somme pas en reste. Le premier EP, « A Bit », produit par Alex Picone, marquait le début d’un beau projet. Le deuxième, « Rip Tide » d’Ewan Jansen, est venu confirmer cette impression.

Sur la première sortie, Alex Picone plaçait la barre haute avec trois pistes interstellaires, aux sonorités mélangeant deep et minimale associées à une magnifique pochette réalisée par Mona Bit, composée de multiples micro-dessins enfantins entrelacés, propre à l’identité visuelle de Seekers.

Morceau éponyme, « A Bit » ouvre la première face avec un rythme décomposé, à l’atmosphère à la fois tripée et mélancolique. Le track parfait en after ou à l’apogée d’un set survolté. On reconnaît les sons percussifs, toms et hit-hats de la TR 808, sur lesquels vient s’ajouter un synthé enivrant. Le tout est ponctué de gros breaks donne un superbe résultat.

La Face B se décline en deux pistes. « Slicky », la plus sombre des trois est tout aussi énergique. La rythmique, cette fois moins inhabituelle, est accompagnée de sons grinçants, contribuant à l’atmosphère ténébreuse nous amenant vers l’introspection. Malgré cette touche expérimentale, le track reste efficace sur le dancefloor, grâce à des percussions très dynamiques.

Sur « Small Room » en B2, on retrouve les sonorités du premier morceau, et particulièrement ces toms si particuliers à la 808 qui apportent toujours plus de profondeur et de puissance. Percussif, il s’en dégage également une atmosphère mystérieuse et hypnotisante mais n’en reste pas moins dansant.

Le deuxième Opus « Rip Tide » sorti en septembre 2015 est plus groovy que le premier. A l’origine anonyme, l’identité du producteur n’a pas tardé à être révélée, et c’est bien l’australien Ewan Jansen qui est derrière ce bijou. A la fin des années 90 il produisait avec Justin Zerbst pour le label Red Ember Records et après plus de quinze ans d’absence, les deux producteurs ressortent de l’ombre. Justin Zerbst fut récemment repressé sur Eklo, le label de Seuil. Ewan Jansen a quant à lui repris du service il y a un an avec le magnifique Bumerang EP pour la team de Francfort HardWorkSoftDrink. Un autre disque tout aussi mystique est à venir sur Inner Balance.

Pour « Rip Tide » Il ne s’agit pas de productions récentes mais bien de quatre perles inédites, produites entre 1998 et 2002, dénichées par Seekers. Ici c’est le thème de la mer qui est mis en avant, l’atmosphère est en effet très aquatique, les nappes ont un coté fluide et liquide.

Avec ses 130bpm et sa rythmique énergique « Gypsea » apporte du dynamisme à sa mélodie profonde et planante. La texture de la bassline très groovy est assez inhabituel pour ce genre de morceau. Les samples de vocaux et la guitare que l’on entend très bien en introduction, donnent une touche de pop aux nappes qui elles sont plus mélancoliques.

Plus posé et moins rapide que « Gypsea », « Water Funk » se veut plus planant malgré une rythmique prononcée, tout droit sorti d’une TR-808. La mélodie sublime et planante donne envie de fermer les yeux et se laisser aller. Ce track est une balade ; ou plutôt une plongée au cœur d’un rêve aquatique ou tout semble irréelle.

« Bluepool » est la plus troublante des quatre pistes. Les mélodies et les nappes dominent jusqu’à ce que la rythmique s’emballe avec un kick profond et entrainant, ponctué par des snares irréguliers. Sur la fin, les nappes reprennent le dessus, en guise de conclusion. Une fois de plus on se sent totalement immergé dans cet univers marin, limpide et coloré.

En B2, « White Squall » revient avec un groove funk à la guitare basse « slappé » associé à des synthétiseurs analogiques faisant de ce morceau celui qui sonne le plus old school du disque. La rythmique simple et efficace se synchronise parfaitement avec les nappes vibrantes. Très tonique « White Squall » demeure assez efficace sur un dancefloor.

Malgré le fait que ce second maxi fut produit il y a 15 ans où plus, il prouve ainsi son caractère intemporel et souligne aussi le regain d’intérêt de nombreux diggers pour les productions des années 90 et les machines analogiques, sans doute pour leur côté peut être moins statique que la production numérique. Seekers s’inscrit parfaitement dans cette dynamique.

Victor Tesson